Lukasz Urban: le destin tragique de la première victime de l’attentat de Berlin. L’homme dont le sacrifice a épargné des vies.
Publié le 21/12/2016 à 14h06 | Allemagne, attentat, Berlin, camion, chauffeur, collecte, Dave Dunkan, dons, Lukasz Urban, Pologne; marché de Noel, solidarité | 3 commentaires
Lukasz Urban est la première victime du carnage terroriste de Berlin. Si chaque victime d’attentat a son histoire, celle de ce polonais de 37, marié, père d’un enfant est particulièrement singulière. Parce que il a été sauvagement assassiné -avant – l’attaque du marché de Noël – par celui qui s’est emparé de son camion, pour en faire une arme de mort. Parce que le chauffeur polonais a réussi dans un geste ultime, malgré ses blessures à stopper la course de mort de camion. Un martyr et un héros pour la famille duquel, une collecte initiée par un routier anglais, a permis de déclencher un élan de solidarité mondial.
Lukasz Urban venait de la petite ville frontalière de Roznovo. Il arrive à Berlin lundi matin en Allemagne, aux environs de 7 heures du matin et aurait du déjà être sur le chemin du retour à l’heure de l’attentat. Le destin lui a été contraire et fatal. A Berlin il devait normalement livrer son chargement de 24 tonnes de produits métallurgiques peu après son arrivée. Mais comme il l’indique alors par téléphone à sa femme, l’entreprise où il devait « décharger » lui a expliqué qu’il est arrivé trop tot, et qu’elle ne serait prête pour l’opération que le lendemain matin. « Cela l’a contrarié quelque peu, car après une semaine de travail non stop, il était pressé de rentrer et de retrouver sa famille.
Vers 14h, il décide de s ‘offrir un « Kebab », et envoie du restaurant une photo à son cousin, Ariel Zurawski, qui est aussi son patron au sein de l’entreprise où il travaille. « on s’est parlé pour la dernière fois a témoigné ce dernier, cela l’ennuyait de devoir attendre, mais on a échangé quelques plaisanteries. On a rigolé ensemble ».
Dans l’après-midi, à 15 heures, Lukasz Urban a un dernier contact téléphonique avec sa famille. Et c’est peu après que tout va basculer… àA 16 heures, lorsque son épouse le rappelle, pas de réponse. le téléphone sonne dans le vide. C’est dans l’intervalle que le drame s’est joué. On n’en connait pas les conditions exactes, mais la police comprendra plus tard que c’est à ce moment-là, qu’un agresseur grimpe dans la cabine et s’attaque au chauffeur polonais. Celui-ci va se défendre, et se battre de toutes ses forces pour défendre son camion pensant sans doute avoir affaire à un simple voleur. La scène qui se joue dans la cabine est d’une violence inouïe. L’autopsie le révélera:: Lukasz Urban est frappé, il résiste, il est alors poignardé, et son meurtrier finira même par tirer sur sa victime à bout portant. le chauffeur après avoir été ainsi sauvagement attaqué est laissé pour mort par le terroriste qui va s’emparer du camion. Et garde sa victime auprès de lui, ceinturé sur le siège passager.
Le poids-lourd étant équipé d’un traceur GPS, en Pologne, le cousin du chauffeur, Ariel Zurawski s’aperçoit que peu avant 16 heures, le camion effectue d’étranges mouvements dans un petit périmètre. Il démarre, avance, recule, tourne à droite, à gauche. « C’était étrange, comme si quelqu’un semblait s’essayer à la conduite d’un poids-lourd, apprendre à le maitriser. C’est ce que j’ai compris en tous les cas après l’attentat. Sur le moment je me suis dit que quelque chose n’allait pas, sans réaliser qu’une tragédie se jouait. J’avais toute confiance en mon cousin. C’était un chauffeur exemplaire, pointilleux, toujours respectueux des règles du métier qu’il exercerait depuis 15 ans et adorait. C’était un type bien ».
Vers 19h30, Ariel Zurawski jette à nouveau un coup d’oeil sur l’écran lié au traceur GPS. Il est alors immobile. et puis soudainement il va se mettre en marche. Le terroriste est au volant du camion et sait exactement où il veut aller. 10 kilomètres plus tard, le voila roulant sur une grande artère qui borde le fameux marché de Noël de Berlin,’installé sur la » Breitscheidplatz » au pied de l’église du Souvenir, et à deux pas du « Kurfürstendamm », vaste avenue surnommée les champs-elysées allemands.
A 20h14, l’attentat: Le camion fait une embardée volontaire sur la droite et ravage sur près de 80 mètres le marché de Noel. Puis vient s’encaster après un virage sur la gauche dans une des cabanes du marché. De nombreuses victimes jonchent le sol. La fête s’est muée soudainement en effroyable tragédie. Le terroriste saute alors du camion et parvient à s’échapper. On retrouvera dans la cabine des traces de son sang, ainsi que tardivement des éléments, (portefeuille, téléphone portable et empreintes digitales) qui permettront de l’identifier. Recherché par toutes les polices du monde, 4 jours après son geste, il sera tué dans une fusillade à Milan par 2 policiers italiens.
Juste après l’attentat, Les policers allemands découvrent à bord du poids-lourd, le corps sans vie de Lukasz Urban. Il leur faudra quelques heures pour comprendre le scénario qui a fait de cet homme, la première victime du carnage (revendiqué depuis par l’état islamique). « Son visage état tuméfié, et en sang. Les traces de coup de couteaux et de coup de feu témoignait de la violence effrayante avec laquelle il avait été tué, et de la vaillance de la résistance qu’il avait tenté d’opposer à son assassin » raconte un policier. Il s’avère que cette résistance a sans doute joué un rôle crucial permettant d’éviter un carnage de l’ampleur de celui de Nice. L’autopsie du chauffeur polonais, a démontré qu’il était encore vivant, malgré ses terribles blessures, lorsque le terroriste a entamé son oeuvre de mort. Et en analysant le trajet du camion, les enquêteurs en sont arrivés à conclure que Lukasz Urban, qui était une force de la nature, a réussi à se jeter sur le volant du poids-lourd, où sur son agresseur,pour faire en sorte que le carnage s’arrête. C’est ainsi que l’on explique le fait qu’au lieu de continuer à rouler tout droit, et à semer la mort au sein du marché, le camion a viré brutalement pour finir sa course folle dans une cabane. Le terroriste a alors (de rage?) achevé le chauffeur-routier avant de s’échapper précipitamment. Le sacrifice ultime du chauffeur supplicié, a sans nul doute permis de sauver d’innombrables vies.
La femme, de Lukasz Urban, à qui les autorités allemandes ont demandé de venir l’identifier formellement, n’en a pas eu la force. Le premier ministre polonais a souligné le courage de celui qui pour tout un pays, et bien au delà de ses frontières, est devenu un héros et un symbole.
Pour preuve, l’extraordinaire élan de solidarité en cours . A la base une initiative lancée spontanément par un routier britannique. Il s’appelle Dave Dukan ne connaissait pas Lukasz Urban.
Il s’appelle Dave Dukan (photo ci-dessus avec sa femme) ne connaissait pas Lukasz Urban. Mais touché par son histoire terrible, il décide au lendemain de l’attentat de lancer une collecte via un site de « crowdfunding ». « J’ai agi comme un compagnon dit-il. J’ai voulu m’adresser à la communauté des chauffeurs-routiers, et bien au delà, à quiconque voulait faire un geste, pour aider un peu, comme je pouvais, la famille de la victime ». Alors il ouvre sur un site de dons une page ou il demande aux uns et aux autres de faire ce qu’ils pourront. Son objectif était de réunir 20 000 livres (23500 euros environ). Il ne savait pas s »il allait y arriver. l’élan de solidarité mondial a dépassé toutes ses espérances., vendredi,, près de 6000 personnes avaient contribué ajoutant des messages souvent très émouvants en l’honneur du héros polonais, et plus de 79 500 livres (95 000 euros) de dons avaient été récoltés par le site. Et les dons de 5, 1à livres, parfois plus ont continué à affluer, à cette heure le montant de 190 000 euros a été atteint et la collecte continue! Le signe que le signes que le courage, le martyre subi, et le geste incroyable qu’il a eu a eu la force d’avoir pour éviter un cannage de masse, ont tai du chauffeur-routier Lukasz Urban, un authentique héros, aux yeux du monde entier.
Frédéric Helbert