Entre Trump et le renseignement US: la guerre froide!
Publié le 12/11/2016 à 15h55 | Bush, CIA, Clinton, DIA, Etat Islamique, General Flynn, General Michael Hayden, Guerre Froide, iran, NSA, Obama, Poutine, Russie, Sécurité nationale, Services renseignement, transition, Trump, USA | Écrire un commentaire
C’est une situation inédite dans l’histoire des USA. De l’aveu même de plusieurs de leurs hauts-responsables, les tous puissants services de renseignements américains, répartis en des dizaines d’agences, un sentiment général de crainte et de défiance règne à l’égard de de Donald Trump au sein de la communauté du Renseignement US. « Comment voulez-vous qu’il en soit autrement lorsqu’on reprend ses déclarations à l’emporte pièces nous concernant et concernant certaines de ses options en matière de politique étrangère » confie un interlocuteur de la CIA en poste en Europe.
La « guerre froide » interne entre Donald Trump et les services US ne date pas d’hier. En aout dernier, en pleine campagne électorale, le candidat Trump avait déclaré sur Fox News: « Regardez ce qu’il s’est passé depuis 10 ans, ça a été catastrophique, ils ont pris tellement de mauvaises décisions, regardez l’Irak, regardez le Moyen-Orient, ils en ont fait un énorme baril de poudre », je ne leur fais pas confiance » .
fait sans précédent alors, 50 anciens très hauts responsables de la sécurité nationale des Etats-Unis avaient alors signé une lettre ouverte, rédigée au vitriol, estimant que Trump n’était pas qualifié pour être président et commandant en chef, qu’il serait un président dangereux, risquant de mettre en péril la sécurité nationale. Et les signataires de la lettre de 2 pages n’avaient pas mâché leurs mots.
« Donald Trump n’a pas le caractère ni les valeurs, ni l’expérience pour être président. Il appauvrit l’autorité morale des USA, pays leader du « monde libre ». Il n’a pas la connaissance basique du fonctionnement de nos institutions, de la Constitution, de nos lois, notamment quant à la tolérance religieuse, la liberté de la presse, et l’indépendance de l’appareil judiciaire. Il a une pauvre compréhension des intérêts vitaux du pays, des challenges diplomatiques complexes, des alliances indispensables qui doivent être les nôtres. En même temps il ne cesse de soutenir nos ennemis, et de menacer nos amis où alliés (…) Malgré son ignorance, il affirme mieux savoir comment gérer la guerre contre l’état Islamique que nos généraux. Il est incapable, où ne veut pas faire le tri entre vérité et mensonge.Il ne tolère aucune critique personnelle. (…) Nous comprenons la frustration du peuple américain, du fait de l’incapacité du gouvernement fédéral à résoudre des problèmes domestiques où internationaux, nous savons aussi que nombreux sont ceux qui doutent d’Hillary Clinton. C’est le cas de beaucoup d’entre nous. Mais Donald Trump n’est pas la solution! Nous avons la conviction que Donald Trump serait le président le plus irréfléchi (où inconscient) de l’histoire américaine ». Au bas de cette lettre, figuraient d’éminentes signatures, de femmes et d’hommes ayant occupé les plus hautes fonctions au sein de l’appareil de sécurité nationale, telle celle du Gl Michael Hayden, ex-boss de la NSA puis de la CIA, ayant servi sous les présidences Bush et Obama.
Mais ils n’ont pas été entendus et aujourd’hui, c’est un « face à face » tendu qui s’annonce entre le Président et les Services de renseignement, alors qu’a sonné l’heure a sonné du partage des secrets les mieux gardés de la nation. La communauté du Renseignement américain semble toute entière, par delà les clivages politiques, partager un véritable sentiment de « crainte » quant au futur. Le mot revient souvent chez ceux qui confient anonymement leur sentiment. Bien qu’Obama soit encore aux affaires jusqu’en janvier prochain, le temps de gérer la transition, Le président élu doit recevoir, d’ores et déjà, comme le veut la tradition, un briefing quotidien notamment sur les opérations extérieures ou l’Amérique est engagée. Barack Obama a ordonné que le processus débute.
Dans les jours qui viennent, Trump devra rendre publique les noms de ceux qui composeront son équipe de sécurité nationale, et le président élu et son équipe auront pour lourde tache de déterminer les caps à suivre, en matière notamment de « programmes » contre-terroristes. « Il apparait d’ores et déjà acquis que Donald Trump va faire une « grande lessive dit un familier de la Maison-Blanche. John Brennan, actuel patron de la CIA, et James Clapper, directeur national du Renseignement vont faire leurs valises. Trump voudra mettre des gens en qui il a toute confiance, et qui ne s’opposeront pas à lui. C’est là que ça se complique et que cela peut devenir dangereux, au regard des projets affichés en matière de politique étrangère ».
L’homme qui supervise les nominations à venir et pourrait occuper l’un des postes majeurs du renseignement américain est le très controversé Michael Flynn, qui fut le patron de la DIA (Defense Intelligence agency) avant d’être démis de ses fonctions par l’administration Obama. L’ancien général 3 étoiles et a été le conseiller spécial pour les affaires de sécurité nationale de Donald Trump pendant la campagne. L’homme avait déclaré en 2015, que « Washington a fait exprès de ne pas stopper l’émergence de Daesh ». Il voit des islamistes radicaux partout au ceux même du pays, et place sur la liste de son vaste « axe du mal ». Il est l’un des partisans du maintien de Guantanamo et même de son « repeuplement », considère que l’arsenal de tortures utilisé dans la prison d’Abu Graêb en Irak a donné de « bons résultats ». Son soutien inconditionnel à Trump l’avait conduit à mener, lors de la convention nationale républicaine, la chorale des supporters déchainés de Trump, a chanter scander à propos d’Hillary Clinton « lock her up » (mettez la en prison »). Il est de ceux qui veulent remettre en cause le deal sur le nucléaire iranien, et nouer une alliance stratégique avec Poutine. Bref tout pour satisfaire le camp Trump,si l’on s’en réfère aux promesses du candidat mais autant d’éléments qui font craindre le pire dans la communauté du renseignement US. Dont il pourrait bien pourtant prendre le contrôle.
Face aux crispations qui émergent en sourdine, le Ministre de la défense sortant, Ash Carter, a envoyé un memo particulier à tous les personnels relevant des départements de la sécurité nationale, leur rappelant qu’ils doivent restés concentrés sur leurs missions et leur devoir de gérer les défis actuels et ceux qui vont émerger durant la période de transition.
Frédéric Helbert