Frédéric HELBERT, journaliste d'investigation

Notre rôle n’est pas d’être pour ou contre, il est de porter la plume dans la plaie. (Albert Londres)


Le parcours, les secrets d’Adnani, la voix et le cerveau des attentats de l’EI

Publié le 31/08/2016 à 01h59 | , , , , , , , , , , , , , , , ,  | Écrire un commentaire

Mohammed El Adnani

Mohammed El Adnani

Ce sont les hommes de Daech qui l’ont annoncé, et cette annonce a retenti  comme un coup de tonnerre. Le « cheikh » Abu Mohammad-el-Adnani est mort! tTué aux abords d’Alep en Syrie, théâtre actuel d’une effrayante bataille. Tué apparemment (à l’heure ces lignes sont écrites) par un raid de l’aviation US. Cette mort, annoncée par l’agence de presse AMAQ est sans aucun doute le coup le plus dur jamais porté à la tête de l’Etat Islamique.

A 39 ans, Abu Mohammed El-Adnani, était présenté comme le « porte-parole »de l’organisation. Il était bien plus que cela, il était un véritable chef de guerre, celui d’une guerre sale. Mohammad El Adnani était le stratège, le cerveau, le grand ordonnateur des attaques terroristes lancées contre l’Occident. Il orchestrait les actions majeures et coordonnées de l’organisation comme il inspirait les attaques lancées par des « loups solitaires », n’ayant jamais été en Syrie, mais répondant aux appels du charismatique chef opérationnel.

Ainsi il avait déclaré en  septembre 2014, dans une diatribe d’une violence inouïe appelant notamment aux meurtres des  français et américains:

« Si vous ne pouvez pas trouvez d’engins explosifs où de munitions,, débrouillez-vous pour vous isoler l’ infidèle français ou l’infidèle américain, où n’importe lequel de ses alliés et fracassez-lui  le crâne, avec une pierre, tuez les à coups de couteau, renversez-les avec votre voiture, jetez-le dans le vide d’une falaise, étouffez-le où empoisonnez-le! » 

Ce message reste encore la référence absolue pour ses fidèles. Mais Chacun de ses communiqués, chacune de ses déclarations audio relayées par « Al Furqan », électrisait la « planète jihadiste ».

Il était considéré, par divers services de renseignements, comme le cerveau des attentats du 13 novembre en France où encore celui de Magnanville, où un couple de policiers avait été tué sauvagement par Larosssi Aballa, lequel avait dans une vidéo, affirmé avoir ainsi répondu à l’appel du cheikh El-Adnani. Sa responsabilité directe ressort aussi dans les enquêtes sur les attentats de Bruxelles, ainsi que d’actions menées aux quatre coins de la planète.

De fait son rôle majeur dans le recrutement par de la les frontières de tueurs au service de l’état Islamique, comme dans celui de stratège d’attaques d’ampleur, dont les plans avaient été établi en Syrie, en avaient fait, la cible n°1 à abattre, l’homme en tête de liste des « Most Wanted », devant l’auto-proclamé calife de l’organisation Abou Bakr El-Bagdhadi…

Une « vocation » de jihadiste précoce née à l’heure de l’invasion de l’Irak en 2003

Les deux hommes s’étaient « trouvés » dans la trop fameuse prison de Camp Bucca en Irak, contrôlée par les américains après leur invasion du pays. Une prison devenue un terreau pour islamistes purs et durs, et le premier « centre de formation » des futurs cadres de l’état Islamique. Car Adnani le syrien était un vétéran du Jihad.  Et s’était engagé dans le combat très tôt en Irak. Son mentor initial fut le jordanien Abou Moussab El Zarakaoui, le précurseur, le leader de l’organisation « Tawid al Jihad », (Unicité et Repentance) qui allait très vite se singulariser par sa violence extrême et ses méthodes qui seront reprises par l’état islamique, prises d’otages, décapitations, combat à mort contre les américains, mais aussi contre les chiites jugés comme des mécréants, une lutte sans merci associée déjà à une médiatisation à outrance. Sur certains marchés de Bagdad, on pouvait trouver alors des CD-rom montrant les « exploits » de l’organisation… Zarkaoui fut le premier à égorger de ses mains, sous l’oeil d’une caméra vidéo, l’otage américain Nicholas Berg. Parmi les multiples enregistrements que, (ayant couvert la guerre d’Irak et ses suites)  j’avais pu alors récupérer, figurait notamment un terrible « best-off » de décapitations en chaine. Zarakoui se livrait aussi à de longues diatribes audio. Le « lion de Mésoptamie » fut tué en 2006 par les bombes de deux F16 américains. Mais il avait tracé le chemin.

Après 5 années de prison, Adnani, ayant appris sa leçon, va jouer un rôle majeur dans la construction du réseau de Bagdhadi. Ensemble, les deux hommes  vont constituer le noyau dur de l’organisation, puis conforter leur règne par la terreur, face à l’ennemi autant que par les purges internes, avant de lancer leur offensive visant créer  un véritable état islamique. Mohamed-El-Adnani fut celui qui annonça officiellement en 2014 l’instauration  du califat ».

L’unité spéciale de terroristes formés pour les attentats

Dans son dernier discours connu, en mai dernier, il affirmait que les attaques (terroristes)  visant les civils étaient les « précieuses et meilleures » que le succès militaires obtenus sur le terrain en Syrie ou en Irak. Selon les révélations d’un repenti, Adnani avait constitué lui-même et supervisait le fonctionnement d’une unité d’élite  de combattants triés sur le volet (EMNI), spécialement formée pour être renvoyés en Occident et y conduire les attaques les plus meurtrières possibles. Une  unité composée de plusieurs équipes selon leur origine, des européens, des asiatiques, des arables… L’un de ces repentis, détenu en Allemagne, a livré les détails d’une scène faisant froid dans le dos: Il a déclaré avoir participé à une conversation en 2015, où les chefs opérationnels de l’unité lui ont dit, chercher en priorité des combattants pour frapper en Allemagne et en Angleterre. Lorsqu’il a demandé et la France? les chefs se sont tous mis éclater de rire, en disant: « ne t’inquiètes pas pour la France, on a tout ce qu’il faut. C’était 7 mois avant les attaques du 13 novembre… Avant d’être envoyés en Occident pour frapper où constituer des cellules dormantes, les membres d’EMNI étaient conduit les yeux bandés, vers le grand chef, pour d’ultimes instructions.

C’est Mohammad El-Adnani qui avait donné une inflexion majeure à la stratégie du groupe, en organisant des cellules spéciales, chargés de travailler sur le recrutement de « moudjahidin » via internet, des hommes n’ayant pas fait le voyage en Syrie, ni reçu de formation, mais a que les manipulateurs de l’EI étaient chargés de transformer en tueurs au nom de l’organisation. C’est lui aussi qui supervisait le choix, et la diffusion des vidéos de l’horreur, chargées de semer la terreur dans le monde entier, (ou d’exercer une sorte de fascination morbide sur de futurs candidats au Jihad).

Dans son appel audio de mai dernier, Mohammed-El-Adnani s’était adressé ç ses fidèles: « Soyez prêts à frapper durement lors du mois du Ramadan, c’est le mois des conquêtes, il faut en faire le mois des calamités, du désastre pour les mécréants, les infidèles, Je le demande surtout aux combattants et supporters du califat aux Etats-Unis et en Europe… Ls plus petites actions que vous pourrez menez au coeurs de leurs pays seront plus efficaces et bénéfiques pour nous, que si vous étiez parmi bous. Sachez que nous aimerions être parmi vous pour punir les croisés jour et nuit ».

La voix de cet homme s’est aujourd’hui tue définitivement. La perte est lourde pour l’état islamique tant ce combattant de la première heure avait acquis une influence, une importance, un place de stratège sans équivalent et tant les membres où supporters de l’EI louaient « son charisme et son habileté, son expérience  unique ». Son expérience diabolique dit un agent du renseignement US.

Désormais les éloges funèbres, les hommages se succèdent pour « le martyr » Abou Mohammed-El-Adnani, émanant des médias officiels de l’état islamique où des membres de l’organisation et de ses supporters. Ils promettent que le combat va continuer. Et affirment qu’ils vengeront celui qui sera difficile sinon impossible à remplacer. L’élimination du « ministre des attentats » est un coup  sévère pour lune organisation pyramidale comme ‘EI. Un de plus subi par une organisation qui essuie des revers sur le terrain militaire en Syrie et en Irak. Mais il n’est rien qui puisse permettre d’imaginer que « le message » terrible d’Adnani, porteur de menaces permanentes, et de conséquences sanglantes, ne lui survivra pas.

Frederic HELBERT  


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À propos de l'auteur

Grand-reporter de guerre, (souvent), journaliste d'investigation, multi-médias, tous terrains, membre de l'association de la presse judiciaire, passionné par les phénomènes terroristes depuis le début de ma carrière à Europe11. Tropisme assumé pour le Moyen-Orient et la péninsule arabe-musulmane. Jamais rassasié d'infos,  accro à tous types d'enquêtes et reportages, j'aime explorer le dessous des cartes de dossiers sensibles. En toute liberté. Vos témoignages, vos infos, vos commentaires sont  bienvenus!

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