Liban. Syrie: A Tripoli, la colère d’un chef salafiste contre la France, Bachar, le Hezbollah. Reportage.
Publié le 03/11/2012 à 08h00 | France, Hezbollah, Liban, Mikati, Salafiste, Sheihk al-Masri, syrie | 1 commentaire
A Tripoli, rencontre avec le chef salafiste libanais Bilal Al-Masri, un homme en colère qui ne mâche pas ses mots, notamment contre la France.
« Assez de blabla la France! Donnez des armes aux rebelles syriens avant qu’il ne soit trop tard! »
Salafiste, père de quatre enfants, mais marié à une seule femme tient-il à préciser en souriant, le Sheihk al-Masri portant le turban noir des descendants du Prophète reçoit dans une petite rue d’une ville ou l’explosion guette à tout moment, ou le conflit syrien s’est exporté, ou la communauté des alawouites, totalement fidèle à Bachar el-Assad, s’oppose régulièrement aux sunnites alliés aux salafistes, qui soutiennent les insurgés de l’armée libre de Syrie. Le Sheihk al-Masri qui accepte de me recevoir est un homme puissant qui ne mâche pas ses mots. C’est est un chef religieux respecté, mais aussi un homme qui ne rechigne pas à utiliser son fusil d’assaut, quand des violences éclatent et qu’il s’agit de défendre les siens… Il peste contre l’armée libanaise, en laquelle il n’a aucune confiance même si elle quadrille la ville, pour s’interposer entre communauté rivales, et depuis l’assassinat à la voiture piégée du général des FSI, Wissam el-Hassan qui soutenait également, très efficacement, à sa manière, les insurgés syriens. La tension est montée d’un cran dans Tripoli, ville natale du le 1er Ministre libanais appartenant au puissant parti du Hezbollah, Najib Mikati. Un premier ministre voué aux gémonies par les salafistes, alliés pour l’occasion à l’opposition sunnite au gouvernement Hezbollah. Une alliance comme seuls les libanais savent en faire, entre les « salafs », et les hommes du « mouvement du 14 mars », (Fouad Siniora sur le terrain, Saad Hariri au téléphone, sur twitter ou sur cette photo aux allures surréalistes dans une rue de Tripoli.
Le sheikh Bilal Al-Marsi m’accueille dans un petit bureau. Derrière lui le drapeau des insurgés syriens. Les mots fusent comme des balles pour condamner abc vigueur » l’inaction de la France, des Nations-Unies, « qui font du blabla, mais se refusent à donner les armes qui permettraient certainement à l’ASL (ou FSA-Free syrian army) de renverser la situation contre l’armée de Bachar el-Hassad et de remporter la partie « .
Le Hezbollah et le gouvernement Mikati dans le collimateur des salafistes
Le sheihk salafiste n’est pas tendre non plus avec les autorités de son son pays, le Liban, ou dit-il » le Liban où Bachar el-Assad et l’Iran via le Hezbollah sont selon lui les maitres du jeu, dans un pays instable transformé en terrain de guerre par ses voisins. Le premier Ministre Najib Mikati n’est qu’un jouet entre les mains de bachar el-Hassad, son ami d’enfance. Ce n’est pas un patriote « . Mais il a menacé, soutient le sheihk Al-Masri les occidentaux en leur disant » si je tombe, tout le Liban tombe, alors les occidentaux se sont couchés devant la menace d’une implosion du pays. De fait, ils sont tous devenus les complices de Bachar el-Hassad. Affirmer par ailleurs que nous les salafistes nous sommes tous des terroristes inféodés à al qaida, c’est de la pure propagande jure le sheihk… Le salafisme n’est pas le jihadisme! Nous soutenons les syriens parce qu’ils veulent libérer et sauver leur pays. Bachar lui veut « bruler » la Syrie et le Liban « . Maitrisant parfaitement le verbe, le chef salafiste dit que « Le Liban est un beau pays et que tout le monde devrait y vivre ensemble en paix, s’il n’était le territoire de jeux de guerres étrangers « . Quand à l’assassinat du général des FSI, Wissam el-Hassan, le sheihk salafiste ne fait pas dans les circonvolutions: » le commanditaire de l’attentat à la voiture piégée, c’est le régime syrien, et les exécutants sont les hommes du Hezbollah… Eux seuls estime t-il avaient les moyens de réaliser une telle opération « …
A l’issue d’un échange, sans langue de bois, riche en formules décapantes, puis de longues négociations… Bilal al-Masri accepte de parler devant la caméra Pour y résumer son propos avec force. Sa première cible: La France. Sa requête essentielle: plus de déclarations inutiles mais des armes anti-aériennes pour les rebelles contre un régime honni…
Précision: Cette interview a été réalisée avant que l’on sache la décision du Président de la République François Hollande, de venir rencontrer à Beyrouth son homologue Michel Sleiman dimanche et de fait réaffirmer -en creux- un soutien occidental au gouvernement Hezbollah qui est l’allié stratégique du régime syrien, contre lequel la diplomatie française n’a pas de mots assez durs…
ITW en VO (langue arabe). Traduction française suit.
Sheihk Abil al-Masri: – Nous disons à la France, son peuple, son gouvernement que cela suffit de jouer avec le sang des syriens, le sang du peuple syrien innocent. Les déclarations incessantes, les discussions, le « blabla », ça suffit! Vous parlez, parlez, mais n’agissez pas! Vous ne faites rien contre ce diable de Bachar el-Assad! La Syrie est un pays en ruines. Tout y est détruit. Et vous en êtes complices! Qu’attendez-vous? Envoyez des armes! Envoyez des Stingers (missiles anti-aériens), pour que le régime de Bachar el-Assad soit mis à bas! Le peuple syrien ne demande pas d’intervention! Donnez juste aux combattants de l’armée libre de Syrie les armes nécessaires. Ils ont la capacité de les manier. ils sauront s’en servir comme il faut. Donnez leur juste les armes pour qu’ils puissent se défendre! Donnez les armes et je vous garantis qu’en une dizaine de jours, le sort du régime criminel et sanglant de Bachar el-Assad sera réglé! Il faut bouger maintenant sinon ce sera trop tard.
FH- Et ici au Liban, qui dirige le pays, le gouvernement, Bachar el-Assad, ses alliés, d’autres puissances?
Seihk al-Masri: – Ce sont Bachar el-Assad et le régime iranien qui dirigent et décident tout. Le gouvernement libanais est sous leur contrôle. Ce ne sont pas des libanais qui dirigent le pays! Le gouvernement libanais n’est pas entre les mains du peuple libanais. Bachar el-Assad a apporté son jeu de cartes. Il les a donné au Hezbollah, il l’a placé au pouvoir. Et Bachar el-Assad et le Hezbollah ont mis Mikati (le premier Ministre) en place n’est là que pour exécuter « l’agenda » syrien, pour faire leur « business ». Le gouvernement au Liban est un gouvernement manipulé par les syriens et les iraniens.
Interview, texte, photos, vidéo à Tripoli, et Beyrouth: Frédéric Helbert.
Avec Olivier Flaisler à Paris.