L’honneur perdu de Karabatic et ses coéquipiers. Pourquoi?
Publié le 02/10/2012 à 11h18 | Handball, Justice, Karabatic, Montpellier, Scandale | 3 commentaires
Le Triste Feuilleton (Suite).
Quand il y a crime, délit, faute grave, manquement à la règle, une des questions première est celle du motif. Pourquoi? Et en l’occurrence pourquoi des hommes présentés comme des sportifs exemplaires appartenant à un club exemplaire, champions en titre, champions du monde et olympiques pour la plupart, au zénith de leur popularité et de leur carrière seraient aller s’embourber dans une affaire aussi minable de pieds-nickelés?
Question d’autant plus prégnante que la Justice va vite, et que pour « bétonner » son dossier face à l’opinion publique, les fuites vont déjà bon train. Et elles ne plaident pas en faveur de Karabatic et de la bande des golden boys de Montpellier.
Le pompon en la matière c’est la radio RTL qui l’a obtenu: On leur a gentiment ouvert le registre des écoutes téléphoniques pratiquées lorsque l’affaire a éclaté publiquement et que l’enquête a débuté, en parfaite violation du secret de l’instruction, mais ledit secret est une chimère piétinée depuis longtemps et qui n’existe plus que sur la page jaunie du Code de procédure pénale.
Des écoutes téléphoniques confondantes
» Là dit un policier intéressé à l’enquête, on est nous même tombés de l’armoire, en écoutant ». Car l’existence de ces écoutes comme pièce à charge, dont j’avais évoqué dans ma précédente enquête le fait qu’elles puissent être l’arme secrète des enquêteurs, est accablante, édifiante, et laisse pantois.
Certes, les joueurs et leurs compagnes ne parlent jamais d’un match truqué, ou qu’ils auraient laissé filer ni des paris, mais ça panique sec. Qu’est ce qu’on va faire? se demande l’un. Un autre appelle sa famille à l’étranger essayant de convaincre sa famille en proie au doute, qu’il n’est pas impliqué. Les tons de voix, les formules, les allusions, tout semble trahir une folle angoisse qui transpire, l’appel désespéré de Jenny Seiz, (qui a avoué avoir parié pour son petit ami 4500 euros), cet appel ou la jeune femme apparait dans tous ses états, adressé à luka Karabatic, le frère de la star Nikola Karabatic, en disent long. Très long. A la jeune femme, Luka Karabatic lui dit qu’elle ne doit pas s’inquiéter, qu’il assumera tout. Qu’il ne faut pas -sic-mentir aux policiers. Par delà cette atmosphère trahissant la panique à bord, il y a le nombre d’appels échangés entre les uns et les autres. Des dizaines. « Ca n’arrêtait pas dit le policier. Comme si aucun d’eux n’avait eu alors l’idée qu’ils puissent être « branchés« . Un élément supplémentaire qui dit que l’on peut-être un star et un joueur au mental d’acier, et perdre pourtant tous ses moyens lorsque l’on est pris la main dans le pot de confitures. Comme ce fut le cas pour les joueurs marseillais ayant trempé dans le scandale OM/VA.
C’est aussi pour cela que le Procurueur de Montpelllier voulait les cueillir sur son terrain, et que l’opération d’agit-prop parisienne l’a singulièrement agacé. Avant qu’il ne se reprenne et que lors de sa conférence de presse hier,et qu’ il ne sorte la mitrailleuse lourde, affirmant que le dossier était en béton armé, lâchant des éléments précis, quitte à prendre lui aussi des libertés avec les usages judiciaires à ce stade de l’enquête…. En amont, entraîneurs, dirigeants du club avaient été interrogé, et informé de la gravité des faits présumés. Ce qui explique leurs mines d’enterrement, mais aussi leur colère, leur rage à peine contenue contre ceux dont ils estiment qu’ils ont trahi le club, et l’idéal sportif. Pour une poignée de cacahuètes au regard des salaires des stars du club et des contrats publicitaires.
Mais Pourquoi?
Si ces éléments sont confirmés dans les heures, les jours qui viennent alors les carottes seront cuites pour des champions, qui ont été tant aimés, ces idoles qui vont être brulées par ceux-là même qui les acclamaient, les courtisait, ces idoles et dont l’avenir s’annonce bien sombre, quelque soit leur système de défense et la qualité de leurs avocats. Et la question va revenir, lancinante. Pourquoi? Pourquoi un joueur du talent, de la trempe de Niko Karabadic, double champion du monde, double champion olympique, champion d’Europe avec les bleus, 7 fois champion de france, 4 fois champion d’Allemagne, deux fois vainqueur de la ligue des champions, et déjà sacré une nouvelle fois champion de France à l’heure ou s’est déroulé le match qui a déclenché la tempête, pourquoi Niko Karabadic réputé pour son intelligence tactique, sa droiture, sa qualité d’homme, et qui attirait tant de sympathies, aurait trempé dans une magouille si minable et déshonorante?
Certes, ce sera à la Justice de prouver l’essentiel, que le match a été truqué, que les joueurs l’ont laissé volontairement filer pour empocher, avec certains de leurs proches plus de 200 000 euros de gains. Une somme rondelette. Une paille au regard de ce qu’ils touchaient, même si leurs salaires, primes, contrats sont bien loin de ceux attribués aux vedettes du football, du tennis, du Basket et autres sports ou les jackpots sont énormes. Si aucun joueur ne craque, prouver le bidonnage du match du match ne sera pas partie facile pour les juges et policiers. Mais le mal est fait. le regard noir du Président de Montpellier, et les réponses succinctes qu’il a lâché hier au cours de sa conférence de presse, ne laissent planer aucune équivoque contre ceux qu’il considère comme des traitres à « l’institution ».
Ces hommes là sont partis ce matin vers Montpellier pour affronter leurs juges. Départ encore une fois médiatisé à outrance, sus l’oeil des caméras. Et les journalistes qui les suivaient, étaient leurs confidents, leurs amis parfois, vont -cette présomption là est forte- changer leur fusils d’épaules. Les avocats des joueurs déplorent les procédés peu honorables de médiatisation du dossier, et les fuites orchestrées alors qu’eux n’ont pas eu accès au dossier. La méthode n’est pas très « élégante », ni très régulière. Mais dans le bras de fer qui oppose les rois du shoot pris la main dans le sac, et la Justice, tous les coups sont désormais permis.
La loi voudrait qu’on accorde à Karabatic et aux autres la présomption d’innocence. Un pur concept, sans cesse malmené. l’amour du sport et les émotions qu’ils nous ont procuré voudraient que l’on se croit encore dans un mauvais rêve. Hier j’avais toujours la tête dans les nuages des images des JO, de cette ivresse folle alors ressentie. Aujourd’hui, j’ai la gueule de bois… Sportifs d’exception Karabatic et ses potes étaient les Dieux du Stade. les voila comme des gladiateurs diminués livrés aux jeux du Cirque, dans la fosse au lions. Un match qui semble déjà perdu d’avance.
Frédéric Helbert.